Retour à la liste des expositions

« C'est pas l'amer à boire »

 

Philippe Mayaux

 

Philippe Mayaux est un artiste plasticien français né en 1961 à Roubaix. Il vit et travaille à Montreuil en France.

Actif depuis le début des années 1990, il se situe dans la double lignée de Marcel Duchamp et Francis Picabia en proposant des œuvres aux couleurs criardes, aux réminiscences souvent érotiques ou sexuelles. Ses références à Magritte et au mouvement surréaliste sont évidentes.

L'exposition présentée à la galerie Net Plus regroupera des œuvres emblématiques de son travail aux images trompeuses.

 

Sur l'exposition :

Depuis la Villa Arson où il a fait ses études, Philippe Mayaux surprend toujours par ses productions. Qu'il utilise des machines absurdes ou des médiums « classiques » comme le dessin ou la peinture, il amuse, dérange, interroge, captive au gré de ses humeurs socratiques.

Ses pairs sont Duchamp et Magritte et son monde le nôtre.

Pour l'exposition « C'est pas l'amer à boire » à la Galerie Net Plus il a conçu une installation marmoréenne : « Les quatre fantômes de l'autorité ».

« L'Ensaignant », « Mr Pub », « Le Dictator » et « Le Prophète » sont, à ses yeux, les quatre piliers de notre société de consommation. Ils déclament chacun, au son de leurs trompettes de l'apocalypse, des mots inaudibles qui se transforment en phrases sonores lancinantes (la référence à Chaplin et à son dictateur est flagrante).

Les portraits de marbre contemporains sont des empreintes 3D de ballons de baudruche recouverts d'un tissu. Un « masque » en surépaisseur prend la place des yeux des fantômes rappelant l'extraordinaire masque de théâtre de Michel-Ange au pied du tombeau des Médicis à Florence. Les bouches sont des trompettes. Les fantômes sont identiques. Chacun est singularisé par des « costumes » rappelant les artifices spécifiques au rôle qu'il « incarne », là encore pied de nez de l'artiste, la carnation n'étant pas la première qualité d'un fantôme.

Entre les piliers de l'autorité, deux étagères sur lesquelles sont rangées deux armées blanches qui s'affrontent : « Angry White» . Pas de doute, visuellement ce sont bien des petits chars, canons et véhicules d'une guerre des neiges sortis d'une scène de bataille sur une planète glacée su film de Georges Lucas « L'empire contre-attaque ».

En y regardant de plus près on remarque que les éléments sont constitués de moulages. L'artiste a coulé dans des blisters (emballages, coques plastiques de nos objets de consommation) du plâtre pour reconstituer avec ces moulages des armes et armées imaginaires : la société de consommation engendre la guerre, voilà ce qu'il nous dit avec son humour aigre-doux.

Plus loin, trois autres étagères (rayons de supermarchés ?) présentent des « Idoles » qui pourraient venir tout droit du Musée du Quai Branly, collections africaines.

A y regarder de près, là encore, les blisters ont servi de moules pour fabriquer ces « Idoles », veaux d'or contemporain, leurres culturels et visuels.

Comme les dessins qui font face aux volumes et qui nous piègent dans nos contradictions de consommateurs quotidiens (n'oubliez pas les titres ils font partie du jeu).

Une exposition en creux donc, faite d'empreintes détournées et de revers de la médaille.

Et comme l'artiste assume ses contradictions, l'ensemble des pièces est à vendre !

Loïc Bodin

Septembre 2017

 

Galerie Net Plus remercient et l'association Les ailes de Caïus remercient Philippe Mayaux et la Galerie Lœvenbruck pour le prêt des œuvres.

Trois questions à l'artiste

1.J'ai l'impression que ton choix d'être un artiste est une position délibérée dans la vie.

Eh bien tu as tort. C'est venu comme un witz romantique, un éclairement, une révélation. C'est arrivé du jour au lendemain, comme ça, comme un truc magique avec beaucoup de chance et de hasards positifs, pendant que j'étais à l'armée. Vraiment. Un soir je me suis mis à étudier l'histoire de l'art et à dessiner quotidiennement. Certes enfant j'ai beaucoup dessiné, construit de maquettes et peint des figurines de plomb mais devenir artiste... Et deuxièmement, ça m'est arrivé aussi comme peintre. C'est-à-dire qu'un jour un camarade des beaux-arts ne voulant plus faire de peinture mais de la photo m'a offert tout son attirail. Ça va te sembler magique, moi qui a pour seul but d'être le plus scientifique possible !

2.Ça veut dire que ça vient comme ça ?

Oui. Du jour au lendemain. J'ai compris le pli que je devais donner aux choses. C'est bizarre hein. Ça a été un éclairement, un truc psychanalico-mystique tu vois. Mais vraiment du jour au lendemain. Je vois ce que je dois peindre. Après, le plus dur est de savoir comment le peindre... c'est un autre problème. Quelle échelle ? Quel fond ? Car mon problème, c'est toujours le fond.

3.Donc ta production à un moment, parce que le sentiment que tu donnes quand même à voir comme ça, c'est que tu es plutôt dans la vie, tu es plutôt engagé dans la vie. Tu n'es pas un type dépressif, atomique. Tu es quand même quelqu'un qui est plutôt... 

...un surhomme nietzschéen ? Je désire être un homme supérieur à moi-même et à mes propres gènes pas aux autres hommes. Le surhomme n'est pas supérieur, il est en dessous au contraire. Un esprit scientifique s'exprimant à travers un gai savoir : Un peintre à travers l'optique. Les artistes changent la vision que l'on porte sur les choses du monde. Ils rajoutent des catégories, des genres. La beauté artistique modifie réellement les corps, Darwin le pensait à la fin de sa vie. Quelque part, quand tu regardes Magritte, il t'oblige à voir les choses comme lui : la coïncidence des formes, les nuages... Tout d'un coup, tu observes le ciel et tu dis « oh ! on dirait un ciel de Magritte ». Il n'a pas inventé les nuages, il les a imités mais d'une telle manière qu'il a créé un genre : Le nuage Magritte. Il y a le stratocumulus, le cumulonimbus et il y a le nuage de Magritte. Il en a fait sa nature. La beauté fait naître la parole. Un artiste est quelqu'un qui transporte sa pensée dans la nature d'un corps. Après les Impressionnistes, on ne voit plus les ombres comme avant eux. Elles sont devenues bleues, oranges, violettes. Pourtant ils n'ont fait qu'appliqué à la lettre les découvertes optiques du XIXe siècle sur les contrastes simultanés qui sont le résultat de notre propre nature, les bâtonnets Rouge/vert/bleu que l'on a dans les yeux.




Extraites de : « L'entretien ivre », Philippe Mayaux, Loïc BodinLivre à paraitre au printemps 2018, Editions de Juillet
Exposition en cours
Faire, Refaire
22/02/2024

Faire, Refaire, céramiques et plaques émaillées Peter Briggs

Détail de l'exposition Citation de l'artiste Interview de l'artiste Les coups de cœur de l'artiste
X